INTRODUCTION
La passe synthèse est une
manipulation inventée par Pierre Edernac, il y a de cela quelques décennies.
Tous les magiciens qui
ont côtoyé Pierre Edernac connaissent cette technique.
Personnellement il me l’avait
présentée lors d’un cours à son domicile, il y a plus de 35 ans.
A
l’époque il m’avait parlé de son intention de sortir un livre sur les tours et
les techniques qu’il avait créés, mais à ma connaissance cet ouvrage n’a jamais
vu le jour.
J’ai pensé que publier cette technique sur ce blog, était à la fois lui rendre hommage, et
éviter ainsi que cette subtile manipulation ne tombe dans l’oubli.
Cette technique permet
d’effectuer un changement de couleur, un empalmage et accessoirement un
contrôle de carte.
En fait, il y a la
passe synthèse, et la passe demi-synthèse. Les 2 manipulations sont identiques.
Seule la position de la main diverge au début du mouvement.
Vous comprendrez mieux
en visionnant les vidéos situées ci-dessous.
Suite à son décès
survenu le 26 Décembre 2011, mon ami Sylvain Solustri qui connaissait bien Pierre Edernac a rédigé un très beau
texte pour lui rendre hommage. A l’époque ce texte avait été publié dans la
revue Arcane.
J’ai reproduit ce
texte en bas de page avec la permission de Sylvain.
Merci Sylvain.
Pour information, il convient d'avoir des mains de bonnes dimensions pour effectuer cette technique.
Pierre Edernac utilisait des cartes françaises de la marque "Grimaud".
Le petit format de ces cartes rendait la manipulation plus facile.
Différence entre passe synthèse et demi synthèse
Tenue de la carte en position de départ pour effectuer la passe synthèse.
Tenue de la carte en position de départ pour effectuer la passe demi-synthèse, suivie d'une série de photos montrant image par image le mouvement de la manipulation.
Cette technique ne sert ici que pour effectuer un changement de couleur.
Démo pour un changement de couleur avec explications
Même démo en vue subjective
Démo pour éventuellement contrôler une carte sur le jeu
Même démo en vue subjective
Avec seulement 2 cartes
Sur la vidéo ci-dessous j'utilise la passe synthèse
pour me débarrasser discrètement d'une carte.
Cette action à lieu à 1mn 50.
-----------------------
PIERRE EDERNAC
1919 - 2011
par SYLVAIN SOLUSTRI
Comme le
disait un de nos proches amis : « c’est une page qui se
tourne ». Notre petit monde magique ne sera plus jamais le même sans la
haute silhouette de Pierre Edernac.
Je ne suis sans doute pas celui qui le connaissait le mieux ni depuis la plus longue date, mais le temps que j’ai passé à la tête du Groupe de Paris m’a permis de l’approcher, de travailler, d’entretenir avec lui des liens professionnels et associatifs et surtout de tisser entre nous des liens amicaux.
Je ne suis sans doute pas celui qui le connaissait le mieux ni depuis la plus longue date, mais le temps que j’ai passé à la tête du Groupe de Paris m’a permis de l’approcher, de travailler, d’entretenir avec lui des liens professionnels et associatifs et surtout de tisser entre nous des liens amicaux.
Je ne
dresserai pas ici son panégyrique, pas plus que je ne résumerai sa
carrière ; d’autres le feront mieux que moi. J’aimerais ici raconter
quelques souvenirs anecdotiques qui montreront un aspect inattendu et cocasse
de ce grand monsieur à l’air sérieux et avec lequel nous avons eu de bons
moments de franche rigolade…
J’ai reçu ma
carte de membre de l’AFAP un beau soir de 1980, si ma mémoire est bonne, des
mains de Marcalbert à la Galerie 55, petit théâtre de la rive gauche assez
réputé et dans lequel avaient lieu les réunions de scène du premier lundi.
Derrière la scène se trouvait une petite salle avec un bar où nous restions après les réunions jusqu’à une heure avancée.
C’est là que je vis Edernac pour la première fois. Un petit groupe s’était formé autour de lui. Je m’approchai et ce que vis ce soir-là pour la première fois – et que je devais revoir souvent par la suite - m’impressionna au plus haut point : les cartes changeaient à vue, disparaissaient, réapparaissaient sous son bras, se transformaient sans que le novice que j’étais puisse comprendre. Pierre était un grand pédagogue, chacun le sait, et s’adressant en particulier à moi qui venais d’arriver au club, il commença à expliquer les techniques de ce que je venais de voir.
Quelle leçon ! Merci, Pierre… Il termina en demandant une cigarette. Il exécuta quelques manipulations puis… fuma la cigarette.
Je compris plus tard qu’il faisait le coup à chaque fois, non pas par avarice, mais parce que sa chère Suzanne n’aimait pas qu’il fume. « L’emprunt » de la cigarette lui permettait de fumer avec les copains sans rentrer chez lui avec un paquet dans sa poche ! On me pardonnera de révéler aujourd’hui ce secret de Polichinelle : il y a prescription !
Derrière la scène se trouvait une petite salle avec un bar où nous restions après les réunions jusqu’à une heure avancée.
C’est là que je vis Edernac pour la première fois. Un petit groupe s’était formé autour de lui. Je m’approchai et ce que vis ce soir-là pour la première fois – et que je devais revoir souvent par la suite - m’impressionna au plus haut point : les cartes changeaient à vue, disparaissaient, réapparaissaient sous son bras, se transformaient sans que le novice que j’étais puisse comprendre. Pierre était un grand pédagogue, chacun le sait, et s’adressant en particulier à moi qui venais d’arriver au club, il commença à expliquer les techniques de ce que je venais de voir.
Quelle leçon ! Merci, Pierre… Il termina en demandant une cigarette. Il exécuta quelques manipulations puis… fuma la cigarette.
Je compris plus tard qu’il faisait le coup à chaque fois, non pas par avarice, mais parce que sa chère Suzanne n’aimait pas qu’il fume. « L’emprunt » de la cigarette lui permettait de fumer avec les copains sans rentrer chez lui avec un paquet dans sa poche ! On me pardonnera de révéler aujourd’hui ce secret de Polichinelle : il y a prescription !
Je me souviens
d’une escapade à Ostende avec lui. C’était à l’occasion d’un des merveilleux
congrès que nous proposait Mephisto-Huis dans les années 80-90 (Ceux qui les
ont connus savent de quoi je parle).
Nous étions partis avec sa voiture. Tout s’était bien passé, nous revenions sur Paris et sur le périphérique Pierre nous dit en riant : « Ah ! dans dix minutes, nous serons à la maison, si nous n’avons pas d’accident d’ici là ! » Et pan ! Un hurluberlu nous percuta sur l’arrière de la voiture ! Trop beau pour être vrai ? Que mon copain Gilles Guerrée, qui était avec nous, dise que je mens s’il lit ces lignes.
Que des petits dégâts matériels, qu’on se rassure !
Nous étions partis avec sa voiture. Tout s’était bien passé, nous revenions sur Paris et sur le périphérique Pierre nous dit en riant : « Ah ! dans dix minutes, nous serons à la maison, si nous n’avons pas d’accident d’ici là ! » Et pan ! Un hurluberlu nous percuta sur l’arrière de la voiture ! Trop beau pour être vrai ? Que mon copain Gilles Guerrée, qui était avec nous, dise que je mens s’il lit ces lignes.
Que des petits dégâts matériels, qu’on se rassure !
C’est curieux,
j’ai pas mal d’histoires en voiture avec Pierre : une autre fois, il me
téléphone pour me proposer un close-up. C’était un samedi en grande banlieue.
Nous nous fixons rendez-vous, nous partons et nous arrivons sur les lieux… Tous feux éteints… Imaginez le début des « Envahisseurs » avec le monsieur qui emprunte une route qui ne mène nulle part ou le motel de Norman Bates dans « Psycho ».
Nous finissons par trouver une porte ouverte et un monsieur qui nous dit que la fête, c’est la semaine d’après ! Pierre s’était juste trompé d’une semaine. La soirée se termina dans une brasserie, à Paris, où je finis l’assiette de Pierre, qui mangeait peu (et moi beaucoup), car il passa tout le temps du repas à me montrer ses trouvailles en techniques de cartes.
J’eus droit ce soir-là, comme souvent, à l’explication détaillée de la passe synthèse, que je n’ai jamais vue exécuter correctement que par lui…
Nous nous fixons rendez-vous, nous partons et nous arrivons sur les lieux… Tous feux éteints… Imaginez le début des « Envahisseurs » avec le monsieur qui emprunte une route qui ne mène nulle part ou le motel de Norman Bates dans « Psycho ».
Nous finissons par trouver une porte ouverte et un monsieur qui nous dit que la fête, c’est la semaine d’après ! Pierre s’était juste trompé d’une semaine. La soirée se termina dans une brasserie, à Paris, où je finis l’assiette de Pierre, qui mangeait peu (et moi beaucoup), car il passa tout le temps du repas à me montrer ses trouvailles en techniques de cartes.
J’eus droit ce soir-là, comme souvent, à l’explication détaillée de la passe synthèse, que je n’ai jamais vue exécuter correctement que par lui…
Autre
souvenir, et ça c’est moins drôle, nous revenions de l’enterrement de notre
vieil ami Jo Martinys (Jean Martin).
Toujours dans sa voiture, ne voilà-t-il pas que l’idée lui vient de me montrer un tour de cartes. Il a lâché le volant pour me le montrer ! J’ai rarement eu si peur en voiture. Mais il faut croire qu’il y a un dieu pour les magiciens automobilistes. (Non, tout de même : je pense à Mystag, qui m’avait lui aussi flanqué une belle trouille en traversant tout Paris pour me ramener chez moi, un soir de réveillon…).
Toujours dans sa voiture, ne voilà-t-il pas que l’idée lui vient de me montrer un tour de cartes. Il a lâché le volant pour me le montrer ! J’ai rarement eu si peur en voiture. Mais il faut croire qu’il y a un dieu pour les magiciens automobilistes. (Non, tout de même : je pense à Mystag, qui m’avait lui aussi flanqué une belle trouille en traversant tout Paris pour me ramener chez moi, un soir de réveillon…).
Je pourrais parler longuement de Pierre Edernac, mais je ne voulais
qu’évoquer quelques souvenirs.
Tout cela nous amène à ces derniers mois. Pierre avait perdu sa femme fin 2010 et ne s’en était pas remis. Au mois de juin de cette année, mon copain Bruno Podalydès, jeune cinéaste ayant le vent en poupe, m’appelle pour me dire qu’il a écrit un scénario avec son frère Denis, dont une séquence se passe dans une maison de retraite imaginaire pour vieux magiciens (Bruno est un fan de magie et pratique la presti habilement).
Il me demande de lui faire un casting d’ « anciens ». Je reprends mon vieux listing et lui communique les noms de vieux copains de plus de soixante-dix ans.
L’élégance de Pierre, sa prestance et son savoir-faire feront qu’il sera sélectionné malgré ses quatre-vingt-douze ans.
Tout cela nous amène à ces derniers mois. Pierre avait perdu sa femme fin 2010 et ne s’en était pas remis. Au mois de juin de cette année, mon copain Bruno Podalydès, jeune cinéaste ayant le vent en poupe, m’appelle pour me dire qu’il a écrit un scénario avec son frère Denis, dont une séquence se passe dans une maison de retraite imaginaire pour vieux magiciens (Bruno est un fan de magie et pratique la presti habilement).
Il me demande de lui faire un casting d’ « anciens ». Je reprends mon vieux listing et lui communique les noms de vieux copains de plus de soixante-dix ans.
L’élégance de Pierre, sa prestance et son savoir-faire feront qu’il sera sélectionné malgré ses quatre-vingt-douze ans.
J’ai retrouvé Pierre sur le plateau très diminué, non pas physiquement, mais psychologiquement. Comme absent, parfois.
L’ami Roka l’a pris sous son aile et l’aidait à passer son costume, le conduisait au maquillage.
Les temps d’attente entre les prises nous permettaient de bavarder. Pierre me confia qu’en perdant sa femme, il avait tout perdu, qu’il s’ennuyait et qu’il n’avait plus le goût de vivre.
Nous essayions de lui remonter le moral comme nous pouvions, mais que dire ? Visiblement, il ne revivait que lorsqu’il avait un jeu de cartes ou une corde à la main. Mais nous avions bien compris que le bout de la route était proche…
L’ami Roka l’a pris sous son aile et l’aidait à passer son costume, le conduisait au maquillage.
Les temps d’attente entre les prises nous permettaient de bavarder. Pierre me confia qu’en perdant sa femme, il avait tout perdu, qu’il s’ennuyait et qu’il n’avait plus le goût de vivre.
Nous essayions de lui remonter le moral comme nous pouvions, mais que dire ? Visiblement, il ne revivait que lorsqu’il avait un jeu de cartes ou une corde à la main. Mais nous avions bien compris que le bout de la route était proche…
Je ne voudrais pas finir sur cette note triste. J’encourage tous nos amis magiciens à aller rire, car c’est une comédie, à « Adieu Berthe », film qui sortira sans doute vers avril ou mai 2012, et qui rendra un ultime et magnifique hommage à notre grand Pierre Edernac.
Pierre Edernac et Sylvain Solustri
♠♥♣♦